Fontaine Charles, "L'honneur souverain est à Dieu"

 Transcription: id 50054
Incipit
L'honneur souverain est à Dieu
Titre
A Monsieur d'Urfé, Chevalier de l'Ordre, et Gouverneur de Monseigneur le Dauphin. Ode VIII. Du vray honneur
Transcription
L'honneur souverain est à Dieu, L'honneur Eternel, et supreme ; L'honneur après doit avoir lieu Envers les Saints, mais non de mesme. L'honneur est deu à la Vertu, L'honneur est deu à la Science, Et à cil qui est revestu De Noblesse et prééminence. L'honneur est deu à tous Seigneurs Belliqueux, suyvans nostre Sire : Qui, par armes et par bons heurs, Font que l'ennemi se retire. L'honneur est deu aux alliez De Roys, et illustres personnes ; Aux Edits qui sont publiez ; A toutes ordonnances bonnes. L'honneur est deu aux Gouverneurs De nos jeunes florissans Princes ; A leurs maistres, vrays enseigneurs De bien gouverner leurs Provinces. L'honneur est deu à nos parens, Au pais, et à nostre terre ; A tous bons amis apparens, Qui ne cachent un cœur de pierre. L'honneur est deu pareillement (Dit Juvenal) à la vieillesse ; Et fault qu'el' soit reveremment Honorée de la Jeunesse. L'honneur n'est point deu vrayement Au riche indigne (dit le Sage), Riche, qui n'est riche autrement Que du vil terrestre avantage. Il fault qu'il die : "Grand merci Mes grans biens et grande richesse" ; Et ne fault pas qu'il die ici : "Grand merci, Vertu et Sagesse". Maint riche quiert estre honnoré En sa grand' pompe et braverie, En habit, ou palais doré. En trionfe et en mommerie : En braves chevaus et harnois, En spadassins et satellites, Dont l'honneur ne donne trois noix, Ny de tous ces fausses merites ; Ains l'honneur les fuit et fuira D'une perpetuelle fuite, Et arriere eus sans cesse ira, Tousjours-tousjours, bien loing-bien vite, Car ils le veulent prendre au doz, A contrepoil, ou bien à force, Et cuident attraper le loz Par une surprise, ou entorse. Mais luy ailé, volant bien loing Se rit d'eus, et de leur emprise ; Et en riant il est tesmoing De leur ignorance, ou sottise. Ce que tu scez trop mieus que moy, Toy qui es la mesme sagesse, Et devroit aprendre de toy Celuy qui ce propos t'adresse. Maint riche quiert donc jeuz et ris, Et toute mondaine bobance. Ce sont les points de luy cheris, Qui le mettent en grand' balance. Mais toy qui la Sainte Vertu Et toutes sciences caresses, Jamais-jamais ne seras tu Surpris de leurs delicatesses. Aussi Dieu, Vertu et Sçavoir, Devant ce Croissant te font croistre : Croissant qui par tout se fait voir Où la Vertu se peut connoistre.
Copiste
Claire Sicard
 
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