Sainte-Marthe Charles de, "Si desconfort et soucy ennuyeux"

 Transcription: id 47925
Incipit
Si desconfort et soucy ennuyeux
Titre
A la Royne de Navarre
Transcription
Si desconfort et soucy ennuyeux,
Et si le Sort contraire et envieux,
Ont à quelcun la Liberté ostée,
Princesse illustre et tres que redoubtée,
Et si avoir perdu sa Liberté,
Est justement comble de malheurté,
Si le malheur rend perfaicte misere,
En reculant à jamais en arriere,
Celuy lequel tasche de s’advancer :
On ne pourroit aultre que moy penser,
En qui ces cas facent leur concurrence.
Quattre ans ou plus, je languis en souffrance,
En languissant du tout hors de moy suis,
Et qui plus est, retirer ne m’en puis,
Car mal sur mal tousjours venant, renforce
Tout le malheur, tant qu’un vour sera force,
Si le dur Sort ne veult un coup cesser,
Mon impuissance haultement confesser.
Quatre ans y a, que jour et nuict j’escoutte,
Si me viendra un jour de quelque routte
Aulcun appuy, où puisse avoir recours,
Mais je ne trouve Amytié, né secours,
D’Amys n’ay plus lesquels me facent feste,
Ilz m’ont laissé, veoyants ceste tempeste.
D’Amys n’ay plus, les tempz en sont passés,
Diray je tout, Madame, n’est ce assés
Ne veoir aulcun qui vexé me soullage ?
Que (d’où mal s’augmente davantage)
Infestément la nature me suit,
Me destitue et (qui plus est) poursuit ?
C’est un dur cas, c’est une peine dure,
Mais le mal plus legierement j’endure,
Car on ne m’a jusqu’icy fait né dit,
Que l’escripture avant ne l’ayt predit.
Et un cas à lequel me reconforte,
C’est, que l'ennuy et le mal, que je porte,
Ne me vient point pour crimes et mesfaicts,
Ce qu’on verra s’on regarde mes faicts.
Où est celuy qui me pourra reprendre,
Que j’ay voulu à bon droict entreprendre,
(Comme Vassal) mon Seigneur maintenir,
Et son party hardyment soubstenir ?
Celuy lequel (ò le cas execrable)
A mis au sus doctrine tres damnable,
Evacuant le sang de Jesu christ,
En se mocquant de son tres sainct escript,
Celuy lequel par tout une Province,
A haultement mesdit de nostre Prince,
Et de sa docte et vertueuse Sœur,
N’a point esté estimé transgressœur,
Mais celuy là, lequel de sa puissance,
Faisant ainsi la deue obeissance,
A soubstenu, Jesus premierement
Comme son Dieu, le Roy secondement,
Comme son Prince et vous haulte Princesse,
Comme sa Dame et tresnoble maistresse,
Celui là (dy je) a esté excusé,
Et cestuy cy faulcement accusé,
Non accusé seulement, mais aussi,
Tant mal mené, qu’il en demeure ainsi.
Ò pleust à Dieu, qu’on en fist remonstrance
A deux ou trois, qui ont part à l’oultrance,
Et fust le tort de l’un l’aultre entendu.
Pour que le droict au juste fust rendu.
Il m’est bien grief de me veoir en arriere.
Et toutefoy la peine est plus legiere,
D’aultant que seur je suis en mon endroit,
Le tout cogneu, ma Cause avoir le droict.
Je ne veulx point avoir aultre defence
Que Verité conjoincte à Innocence.
Si en celà je ne puis estre ouy,
Je suis pourtant en malheur resjouy,
Que je n’endure ainsi pour malefice,
Mais en faisant le debvoir de l’office,
Auquel j’estois delà constitué.
Si je languis de tous destitué,
Jesus m’aura tousjours en soubvenance.
Quoy que ce soit j’ay encor’ esperance,
Que tournerez vers moy vostre droict œil,
En me faisant un soubriant recueil,
Ainsy qu’aviez acoustumé de faire
Auparavant, Princesse debonnaire.
Copiste
Claire Sicard
 
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