Traduction d'une canzone d'Annibal Caro (lié aux Farnèse) qui commence "Venite all' umbra de' gran gigli d'oro" et qui est composée au plus tôt dans la seconde moitié de 1553, vraisemblablement en 1554 (voir article en bibliographie). Henri Chamard fait l'hypothèse que la traduction de Du Bellay, qui est alors à Rome, est à peu près contemporaine du texte source.
La dernière strophe s'adresse à la "Chanson" dont Henri Chamard fait toutefois remarquer qu'elle correspond parfaitement à la facture d'une ode pindarique dans laquelle chaque troisième strophe (épode) est un dizain d'heptasyllabes, alors que les strophes et les antistrophes sont des dizains d'octosyllabes
La première strophe, qui semble assez éloignée du texte de Caro, pose un problème d'interprétation : au v. 4-5 les "giacinti" (jacinthes) du texte italien sont traduites par "noz Marguerites" et la suite du poème engagerait à reconnaître sous cette image topique Marguerite de France et Marguerite de Navarre, si cette dernière n'était déjà morte depuis 4 ou 5 ans au moment de la composition du texte. Au demeurant la future reine Margot, fille de Henri II, ne paraît pas pouvoir être concernée par l'évocation, même si elle est née en mai 1553 : on s'expliquerait mal, malgré l'appel du jeu onomastique, que les Carites '"honor[ent]" davantage cette fillette que ses sœurs aînées, Claude et Elisabeth, toujours vivantes. L'hypothèse que la seconde Marguerite, "naïv[e] " (v. 4) et "bell[e] fleu[r]" (v. 14) protégée de la morsure du soleil par le nom de cet autre astre qu'est Henri II (v. 11-20) soit la femme du roi, Catherine de Médicis, paraît improbable et maladroite, surtout sous la plume avertie d'un Du Bellay, même si on pourrait penser que cette association inhabituelle pourrait procéder de celle - au contraire topique - de Catherine à Junon (v. 121), déesse dont le texte précise qu'elle est à la fois "compaigne / Et sœur" de Jupiter. Toutefois l'hypothèse reste peu convaincante.
À la rigueur, on pourrait plutôt imaginer que sous cette image Du Bellay évoque la maîtresse du roi, Diane de Poitiers, dont le prénom, lié à la lune pourrait expliquer l'allusion, v. 13-20, au risque de décoloration que le vrai soleil fait courir aux deux Marguerites. À notre connaissance, néanmoins, Du Bellay n'use pas ailleurs des images de la marguerite ou de la perle (traduction du latin margarita) pour parler de Diane de Poitiers. Même si cette dame peut paraître la grande absente d'un texte qui évoque en revanche la fille naturelle qu'a eue Henri II avec une maîtresse italienne mais qui porte le même prénom qu'elle, l'hypothèse nous paraît à ce stade beaucoup trop fragile pour que nous intégrions son nom à la liste des personnes évoquées par la pièce.
Dans la liste des relations indiquées, manque donc la personne non identifiée représentée par cette image florale et qui devrait se placer à côté du nom de Marguerite de France et avant celui de Henri II.